Introduction :
A mi-chemin des garanties à première demande et des
engagements de caution, les lettres d’intention occupent une place originale
dans le domaine des sûretés du crédit.
La lettre
d'intention ou de confort est une
pratique fréquente de la vie des affaires, notamment entre société mère et
filiale, afin de faciliter l'octroi d'un concours bancaire ou la signature d'un
contrat.
Cette garantie, qui se veut
souple et informelle pour échapper aux rigidités du cautionnement, recouvre des
réalités très différentes allant de la simple recommandation jusqu'à
l'engagement de se substituer au débiteur en cas de défaillance de ce dernier.
Elle peut consister en une obligation de faire (ex. : garantir une
trésorerie suffisante) ou de ne pas faire (i.e. : céder ou réduire sa
participation, retirer son compte courant, contracter avec un tiers, etc.) et
engage la responsabilité du garant si l'obligation n'est pas respectée
Utilisées dans le cadre de groupes de sociétés, tant dans les relations
internationales que domestiques, les lettres d’intention, encore appelées
lettres de confort ou lettres d’apaisement, ont une fonction sécuritaire
distincte quant à leur mise en œuvre et à leur portée de celles d’un
cautionnement, d’une garantie à première demande ou d’une simple lettre de
présentation.
Issues de la pratique, et à la différence du cautionnement (les lettres
d’intention ne sont connues du législateur qu’au travers du seul article 2322
du Code civil, créé par l’ordonnance du 23 mars 2006 réformant le droit des
sûretés.
Elles se définissent comme « l’engagement de faire ou de ne pas faire
ayant pour objet le soutien apporté à un débiteur dans l’exécution de son
obligation envers son créancier ».
Cette définition laisse au rédacteur de la lettre d’intention la plus
grande liberté pour fixer la portée de son engagement et les limites de ses
obligations.
Qu’elle est la nature juridique de la lettre d intention et pour répondre
a cette question nous allons dans un premier temps définir cette notion et la
comparer avec des notions voisines ?
Partie 1 Condition d’
émission de la lettre d’ intention
Chapitre 1 Lettre d’
intention et promesse de crédit [1]
Pour comprendre le
débat qui se mène autour de la lettre de confort, il apparaît nécessaire de
définir, au préalable, les
circonstances qui lui donnent
naissance.
Généralement, c'est à
la phase de négociation d'un crédit,
matérialisée par une promesse de crédit, qu'une banque et une entreprise (la
filiale d'un groupe) peuvent convenir de l'utilisation de la lettre de confort
comme la forme ou l'une des formes de garantie du crédit à octroyer. La lettre
de confort est entendue dans ce cas comme une condition de l'engagement de la
banque.[2]
Section 1 Lettre de
confort comme condition préalable à l'ouverture du crédit
La promesse de crédit
se matérialise par un document par lequel une banque s'engage à accorder un
prêt ou un crédit à un emprunteur quelconque. L'opportunité et la teneur de
cette promesse dépendent du type de rapport qui existe entre la banque et son
client. S'agissant de la filiale d'un groupe, si les relations d'affaires entre
la banque et elle ne sont pas encore très développées, la promesse de crédit ne
serait que préalable à un accord formel d'ouverture de crédit. Mais si la
banque fait suffisamment confiance à la filiale, ou si l'opération pour
laquelle le crédit est sollicité n'est que ponctuelle, la promesse de crédit
pourrait comporter assez de détails qui rendraient inutile la conclusion subséquente
d'un accord de crédit. Généralement, la promesse de crédit se borne à
déterminer les conditions d'affaires entre les parties.
La promesse de crédit
n'obéit à aucun formalisme rigoureux, Mais la banque n'a pas intérêt à faire
une promesse hasardeuse ou à poser des actes qui entretiennent le doute sur sa
véritable intention par exemple :
l'octroi ou le renouvellement de
facilités de caisse pendant un certain temps, ne fut-ce une simple tolérance de
découvert, peut tout de même établir la volonté du banquier de consentir une
véritable ouverture de crédit. Pour
éviter ces aléas juridiques, la banque émet généralement sa promesse sur un formulaire-type. Ce formulaire comporte, notamment, le montant
du crédit, les conditions préalables à son ouverture effective, ses garanties,
le taux d'intérêt, les termes de remboursement, etc.
Section 2 La valeur juridique de la promesse
de crédit [3]
·
L'hypothèse où
la lettre de confort est effectivement souscrite
Il peut arriver que la banque exige de la
filiale la souscription d'une lettre de confort comme seule forme de garantie,
mais tout en se réservant une liberté de refus. [4]Dans
ce cas, la banque n'a aucune obligation d'accorder le crédit, même si la lettre
de confort est effectivement
souscrite. Sa promesse
d'ouvrir le crédit n'est pas une obligation de résultat; la promesse de crédit n'est pas une créance
de somme d'argent, mais une simple obligation de faire. Ceci est bien entendu sans préjudice des
recours en dommages-intérêts ouverts à la
filiale, mais seulement pour
les cas relevant de la responsabilité délictuelle de la
banque. En effet, une institution
financière, qui n'est pas tenue d'avancer des fonds, ne peut être accusée de
violation d'un contrat au cas où elle ne s'exécuterait pas. De plus, un
banquier demeure libre de refuser d'ouvrir un crédit, car celui-ci est fondé
sur la confiance et comporte un haut degré d'intuitu personae, sauf, bien entendu,
les cas d'abus de droit.
En l'absence d'une telle réserve de clause au
profit de la banque, la liberté de refus ne se justifierait pas si la banque a
fait une promesse ferme de crédit. Dans la même optique, si la seule condition
préalable imposée par la banque est la souscription d'une lettre de confort,
il nous paraît logique que la banque
soit obligée à accorder le crédit lorsque cette condition est remplie ; le
contrat étant parfait dans ce cas.
·
L'hypothèse où
lettre de confort n'a pu être souscrite [5]
la non souscription de
la lettre de confort, condition préalable à l'octroi du crédit, n'enlève pas à
la lettre d'engagement son caractère contractuel ; aussi, tout accord ou
contrat de crédit signé subséquemment à la lettre d'engagement doit-il
respecter les termes de ce dernier.
La banque peut accorder
tellement de poids à la lettre de confort qu'elle en fait une condition
résolutoire de son engagement envers la
filiale . Dans ce cas, la non souscription de la lettre de confort entraînerait
ipso facto la nullité de la promesse de crédit.
Mais suivant
l'importance qu'elle accorde à la lettre
de confort, la banque peut également n'en faire qu'une condition suspensive de l'ouverture du crédit. Ici, l'engagement
de la banque demeurera et sera exécuté dès que la filiale trouvera une solution
alternative à la Lettre de confort, si la banque y consent.[6]
Chapitre 2 Lettre de
confort et autres formes de sûretés personnelles
la
lettre de confort, au sens strict, est une lettre contenant la promesse d'une
société mère de faire, de ne pas faire ou de donner quelque chose au profit
d'une banque qui octroie un crédit à sa filiale. [7]
Au
sens large, la lettre de confort est la lettre par laquelle une société promet
de faire, de ne pas faire ou de donner quelque chose au profit d'un
établissement financier qui accorde un crédit à une société avec laquelle elle
est en relations d'affaires.
Que ce soit au sens
strict ou au sens large, la lettre de confort contient une promesse ou un
engagement ferme. De ce point de vue, n'est pas une lettre de confort, la
lettre qui se limite à la simple description d'une situation de fait, sans
engagement ni promesse. Le critère de l'engagement ou de la promesse nous
permet de tracer la ligne de démarcation.
En effet, la
souscription d'une lettre de confort répond au besoin de sûreté exprimé par
l'établissement financier qui veut accorder un crédit à une société donnée.
L'établissement en question a le choix entre plusieurs formes de sûreté, tels
que le cautionnement et la garantie autonome. Si l'établissement n'a pas
recours à ces formes de sûreté établies, c'est certainement parce qu'il veut
éviter les complications auxquelles elles donnent souvent lieu. En demandant à un emprunteur potentiel de
souscrire une lettre de confort. !'établissement financier ne renonce
aucunement à la garantie dont il a besoin. Au contraire, comme l'a souligné le président de l'Association française des
banques, l'établissement croit que la lettre de confort lui présenterait en pratique une sécurité comparable à celle
d'un engagement de caution .
L'on
a pris l'habitude de classer la lettre de confort parmi les sûretés
personnelles. Cela se justifie par le fait que la lettre de confort représente l’engagement
d'une personne ou d'une institution envers un créancier qui est généralement
une banque. Le but de cet engagement est de renforcer la confiance du créancier
envers un débiteur potentiels. Mais la lettre de confort est tout de même une
forme particulière de sûreté personnelle qu'il faut distinguer, d'une part, de
la sûreté classique qu'est le cautionnement et. de l'autre, de la garantie
autonome.
Section 1 Lettre de confort et cautionnement
Le cautionnement
intervient fréquemment dans le cadre des dettes de l'entrepris. À l'intérieur d'un groupe de sociétés, une
société mère peut cautionner les engagements de sa filiale. Le cautionnement
offre à un établissement de crédit un
moyen de limiter les conséquences de l'indépendance juridique, souvent
artificielle, entre les diverses sociétés d’un même groupe. Mais dans le même
temps, le cautionnement d'une société par une autre pose des problèmes liés aux
limites imposées par le droit des sociétés aux pouvoirs des dirigeants en
matière de garanties.
Pour contourner ces
difficultés, les sociétés mères préfèrent recourir à la lettre de confort dont
les modalités ne sont pas aussi rigoureuses que celles du cautionnement.[8] En
effet, alors que la caution s'oblige à procurer au créancier le résultat
attendu de l'opération qu'il a conclue avec le débiteur le groupe qui émet une
lettre de confort n'assigne généralement pas à son acte une telle fonction
économique.
Selon l’ article 1117 [9]:Le cautionnement est un contrat par lequel une personne
s'oblige envers le créancier à satisfaire à l'obligation du débiteur, si
celui-ci n'y satisfait pas lui-même.
De ce point de vue, le
risque d'insolvabilité se trouve partagé entre deux patrimoines, celui du
débiteur et celui de la cautions[10] ;
ce qui n'est pas le cas de la lettre de confort. L'engagement pris par la
société mère qui émet cette lettre n'a toujours pas pour but de créer
directement un avantage patrimonial au compte de la banque qui veut accorder un
crédit à sa filiale, mais
plutôt d'affirmer la
continuité de ses relations d'affaires avec la filiale et son intention de
faire en sorte que cette filiale soit en mesure d'honorer ses engagements.[11]
Mais nous voulons déjà souligner qu'à
la différence du cautionnement,
l'auteur d'une lettre de confort ne vise pas toujours le paiement d'une somme
d'argent ou l'exécution d'une obligation pécuniaire pour le compte d'un
débiteur. Le groupe ou la société mère qui émet une lettre de confort peut
simplement déclarer avoir connaissance du crédit que la banque veut octroyer à
sa filiale ; elle peut également garantir la permanence de son investissement à
la filiale ; elle peut aussi rassurer la
banque contre la mauvaise gestion de la filiale ; elle peut enfin s'engager à
soutenir financièrement la filiale. Mais dans toutes ces hypothèses, qui ont
pour fin de renforcer la crédibilité de la filiale et d'accroître la
probabilité qu'elle rembourse la banque, la lettre de confort ne garantit pas
pour autant le remboursement direct du crédit', ce qui aurait pu avoir des
incidences sur l'état financier de la société mère émettrice.
Alors que les
circonstances de rédaction et le contenu de la lettre de confort peuvent servir
à établir, par présomption, un véritable engagement contractuel, le cautionnement
repose essentiellement sur le principe du consensualisme. Le cautionnement
résulte toujours d'un contrat', c'est-à-dire d'un échange de consentements
clairement exprimés. Selon l’article 1123 [12]:L'engagement de la caution doit être exprès et ne se
présume point. Or, il n'est pas
évident que l'émetteur d'une lettre de confort consente à conclure, un contrat
Il faut souligner
également. toujours pour marquer la différence entre le cautionnement et la
lettre de confort, que l'obligation assumée par la caution est accessoire à
celle du débiteur principal (en vertu de l'adage accessoire suit le
principale). [13]Il
suit de ce principe que la caution peut opposer au créancier toutes les
exceptions dont peut se prévaloir le débiteur principal. Or, l'engagement pris
par l'émetteur d'une lettre de confort n'est souvent pas aussi fort pour qu'il
lui soit possible d'être subrogé dans les droits de celui pour le compte duquel
il s'engage[14].
Section 2 Lettre de confort et garantie autonomes
Les garanties autonomes, ou à première demande, sont une forme de
sûreté créée par la pratique commerciale internationale. Elles sont proches du
cautionnement dans la mesure où elles impliquent également l'engagement d'un
tiers (une banque garante ou contre garante) pour le compte d'un débiteur)
envers un bénéficiaire. Mais contrairement au cautionnement, I ‘engagement pris
par la banque est indépendant des rapports juridiques entre le débiteur.(appelé
donneur d'ordre) et le créancier, bénéficiaire de la garantie. s'ensuit que le garant est tenu à titre
principal et ne peut opposer au bénéficiaire aucune exception tirée du
contrat entre ce
dernier et le donneur d'ordre. Il a pris, du seul fait de la garantie, un
engagement propre.
La lettre de confort
est aussi un procédé de garantie développé par les transactions commerciales
internationales, mais cette garantie n'est pas dans tous les cas certaine,
directe et indépendante. Dans l'esprit de son émetteur, c'est un document par lequel un tiers exprime à un
créancier son intention de soutenir son débiteur afin de lui permettre de
remplir ses engagements . Le but de ce document n'est pas de créer un lien
juridique autonome entre l'émetteur et le bénéficiaire, mais plutôt de mettre
cc dernier en confiance dans ses rapports de crédit avec le futur débiteur.
Partie 2 : Les différentes
catégories de lettres d’intention :
En l’absence
d’encadrement législatif concernant le régime juridique des lettres
d’intention, il incombe à la jurisprudence d’en définir les contours. Ainsi au
fil des arrêts rendus par la Cour de cassation il ressort que les lettres
d’intention peuvent être classées en trois catégories.
Chapitre 1
la nature juridique
Section 1 :
Les lettres
d’intention comportant un simple engagement moral :
En effet, les lettres d’intention sont à
la base des engagements moraux. Elles
confortent le prêteur dans la bonne fin du crédit consenti à la société filiale
et le rassurent sur le soutient que l’actionnaire majoritaire apportera à sa
filiale en cas de difficulté de remboursement. Ce soutient consiste, d’une manière générale,
à se préoccuper ou à faire en sorte que la société filiale dispose de la
trésorerie suffisante pour honorer ses engagements bancaires.
De ce point de vue les lettres
d’intention ainsi rédigées ont une faible fonction sécuritaire si bien que les
établissements de crédit ont cherché à bénéficier d’engagements plus fermement
rédigés, susceptibles de générer à la charge du signataire une obligation
juridique dont le non respect ouvrirait au bénéficiaire une créance en
exécution forcée ou en allocation de dommages et intérêts.
Section 2 : Les lettres
d’intention comportant une obligation de moyens.
Celles-ci sont plus
coercitives et obligent le créancier à mettre en œuvre les moyens nécessaires
pour faire en sorte que le débiteur puisse honorer ses engagements. Mais cette
obligation a pour
limite les propres moyens, et notamment les moyens financiers, dont dispose le
signataire de la lettre.
La constatation de l'existence d'une
obligation de moyen permet d'engager la responsabilité contractuelle du
débiteur de cette obligation. Le créancier devra alors prouver l'existence
d'une faute commise par le débiteur de l'obligation, d'un dommage et d'un lien
de causalité entre cette faute et le dommage provoqué.
L'existence d'une telle obligation
prendra la forme d'une lettre d'intention où une société mère s'engage à faire
« tous les efforts » ou « les meilleurs efforts » pour que la filiale exécute
ses engagements à l'égard de la banque. Les exemples sont nombreux et une
jurisprudence abondante mais également mouvante et parfois casuistique permet
de lister les expressions faisant naître une obligation de moyen de celles
faisant naître une obligation de résultat.
Quant à la constatation de la faute, elle
dépendra de l'étendue des « efforts » promis par la société mère, souvent
difficile à évaluer. Celui qui est tenu par une obligation de
moyens doit faire son possible pour y faire
face. Cependant, il ne s'engage pas formellement à y parvenir.
Constitue donc, selon la jurisprudence,
une obligation de moyens, la lettre d'intention contenant la promesse d'une
société mère de faire tout ce qui est en son pouvoir pour que sa filiale
poursuive son activité, afin de tenir ses engagements vis-à-vis de ses
créanciers.
Il n'est cependant pas du tout possible de demander à la signataire de la lettre d'intention qu'elle fasse des efforts incompatibles avec sa propre survie (Cass. commerciale 17 octobre 1995).
Pour mettre en jeu la responsabilité de la signataire, le bénéficiaire de la lettre doit démontrer qu'elle a commis une faute et qu'il a subi un préjudice.
Il n'est cependant pas du tout possible de demander à la signataire de la lettre d'intention qu'elle fasse des efforts incompatibles avec sa propre survie (Cass. commerciale 17 octobre 1995).
Pour mettre en jeu la responsabilité de la signataire, le bénéficiaire de la lettre doit démontrer qu'elle a commis une faute et qu'il a subi un préjudice.
Section 3 : Les lettres d’intention
comportant une obligation de résultat
Obligation de
résultat correspondent au niveau le plus élevé de sécurité
juridique et conduisent à faire en sorte que le créancier soit effectivement
désintéressé en cas de défaillance du débiteur. L’exécution de cet engagement
peut conduire d’une manière indirecte le signataire de la lettre d’intention à
payer effectivement le créancier et conduit la jurisprudence à l’assimiler à
une garantie soumise au formalisme présidant à leur délivrance par une société
par actions (conformité à l’objet social, intérêt pécuniaire pour la société
qui s’oblige à signer une lettre d’intention, autorisation préalable du conseil
d’administration).
Seule une lecture attentive et une
compréhension exacte de sa portée permettent de classer une lettre d’intention
dans l’une ou l’autre des catégories sus-visées et d’en tirer toutes les
conséquences sur l’efficacité de l’engagement ainsi souscrit.
Dans son document écrit, la société mère promet
d'obtenir un résultat déterminé (par exemple, elle s'engage à payer une dette
de sa filiale). Il suffit donc de constater que le résultat n'est pas atteint
pour engager la responsabilité de la signataire. Dans ce cas, inutile de
démontrer une quelconque faute commise par cette dernière.
Ainsi, les juges ont décidé que correspond à une obligation de résultat l'engagement pris par une société mère d'assumer " la couverture des besoins financiers de sa filiale en tant que besoin " ou encore d'assumer complètement " les difficultés financières de sa filiale".
Toutefois, la société mère qui a déclaré faire le nécessaire pour que sa filiale dispose d'une trésorerie suffisante lui permettant d'honorer ses obligations envers ses créanciers, ne se substitue pas pour autant à cette dernière en cas de défaillance.
La société mère n'est tenue qu'à une obligation de moyens. La lettre d'intention précisait qu'en cas de non-remboursement, les créanciers pourraient exercer tous les recours qu'ils jugeraient utiles, et ce, directement contre la société mère (Cass. commerciale 18 avril 2000).
Ainsi, les juges ont décidé que correspond à une obligation de résultat l'engagement pris par une société mère d'assumer " la couverture des besoins financiers de sa filiale en tant que besoin " ou encore d'assumer complètement " les difficultés financières de sa filiale".
Toutefois, la société mère qui a déclaré faire le nécessaire pour que sa filiale dispose d'une trésorerie suffisante lui permettant d'honorer ses obligations envers ses créanciers, ne se substitue pas pour autant à cette dernière en cas de défaillance.
La société mère n'est tenue qu'à une obligation de moyens. La lettre d'intention précisait qu'en cas de non-remboursement, les créanciers pourraient exercer tous les recours qu'ils jugeraient utiles, et ce, directement contre la société mère (Cass. commerciale 18 avril 2000).
Chapitre 2 Les limites
Section 1 Quelles sont les lettres
d’intention soumise à autorisation préalable ?
Traditionnellement,la
jurisprudence distinguait les lettres d'intention constitutives d'une simple obligation de moyens exclues
du régime d'autorisation [15],
et celles garantissant au bénéficiaire un résultat déterminé dépourvu de tout
aléa, constitutives d'une obligation
de résultat,et assujetties à l'autorisation préalable du conseil
d'administration[16]
Cette distinction délicate
a donné lieu à des hésitations jurisprudentielles.
Ainsi,
l'engagement de « faire tout le
nécessaire » pour qu'une filiale dispose d'une trésorerie
suffisante a été successivement qualifié d'obligation de moyens [17],
puis de résultat [18].
En effet, en vertu de
l’ article 70 [19],
les « cautions, avals et garanties donnés par des sociétés autres que celles
exploitant des établissements bancaires ou financiers » doivent faire l'objet
d'une autorisation du conseil d'administration des sociétés anonymes. La même
loi précise que cette autorisation doit être d'une date antérieure de moins
d'un an à celle de la signature des actes.
Le représentant légal
de la société peut solliciter ladite autorisation. Il peut s'agir d'une
autorisation au cas par cas ou d'une
délégation plus large, n'excédant pas, en tout cas, un an. Dans la dernière
hypothèse, le conseil d'administration fixe un montant annuel (une enveloppe
globale) que le dirigeant ne doit pas dépasser. Si cela devrait être le cas,
celui- ci est tenu de revenir devant le conseil pour solliciter une
modification de la délégation ; autrement, l'acte posé par ce dirigeant ne
serait pas opposable à la société.
Le but visé par le
législateur en édictant ces mesures est de limiter les pouvoirs du représentant
légal de la société en vue de protéger les actionnaires et les créanciers
contre ses actes jugés dangereux ou à gros risque. Les cautions, avals et
garanties sont visés parce qu'ils comportent des risques de sortie de fonds
pour la société.
Section 2 La remise en cause de la
distinction jurisprudentielle
L'ordonnance du 23 mars
2006 devrait mettre fin au débat.
Qualifiée de sûreté
personnelle [20],
toute lettre d'intention émise depuis le 23 mars 2006 devrait désormais être
considérée comme une « garantie » relevant nécessairement du régime
d'autorisation préalable.
La Cour d'appel de
Paris a jugé que l'engagement souscrit par une société mère de « reconstituer
les fonds propres » de sa filiale et de l'accompagner dans son redressement
requerrait l'autorisation du conseil de surveillance, sans faire aucune référence à la nature de l'obligation
souscrite.
Quelles conséquences en l’absence d’autorisation préalable ?
Qu'en est-il en
l'absence d'autorisation ? La sanction est très sévère pour le créancier.
La lettre
d'intention non autorisée est inopposable à
la société [21]qui
s'est portée garante et ne l'engage pas [22].
Le défaut
d'autorisation n'engage pas davantage la responsabilité du dirigeant signataire
dans la mesure où la faute commise n'est pas considérée comme détachable de ses
fonctions .[23] D'où
la nécessité d'exiger systématiquement la délibération qui a autorisé la
signature d'une lettre d'intention.
Section 3 la
consécration légale de la lettre d'intention ne va t'elle pas causer sa perte ?
La souplesse qui
caractérise cette garantie s'accommode mal du formalisme qui lui est imposé. D'aucuns
en viennent même à s'interroger sur l'opportunité d'une suppression de
l'autorisation préalable des cautions, avals et garanties consenties pour le
compte d'une société anonyme par son dirigeant.
La question
mérite d'être posée d'autant que cette exigence n'est pas imposée aux autres
sociétés (SARL, SAS, SNC, sociétés civiles, ...) et ne s'applique pas
lorsqu'une société étrangère s'engage en faveur de sa filiale française.
Conclusion :
La lettre d'intention n'est pas vraiment
réglementée, mais elle détermine la portée de responsabilité de la société
mère. Cette dernière souhaite soutenir sa filiale tout en limitant sa réelle
implication.
La responsabilité de la société mère peut n'être
qu'une sorte d'engagement moral. Car cette dernière ne peut fournir une aide
qui mettrait en péril sa propre survie.
Le signataire de la lettre d'intention se porte
garant du résultat de sa filiale. Point n'est besoin de démontrer une
quelconque faute de cette dernière pour engager la responsabilité de la société
mère, en cas d'insuffisance de trésorerie de la filiale.
La
lettre d'intention constitue un véritable cautionnement de la société mère
vis-à-vis de sa filiale. Cependant, les créanciers ne sauraient prétendre, dans
leur recours contre la société mère, à obtenir plus qu'un simple remboursement
des sommes dues par la filiale.
[1].Francois
Gruma , Contrats bancaires. tome
1. Économica, 1990. p. 220.
[2] CHARLES
MOUMOUNI le statut juridique des lettres
de confort dans les transactions de crédit bancaire 1997
[3] Jean-Louis Rives-Lange el
MoniqueContamine-Raynaud Droit bancaire.
Dalloz. Paris. 1995. p.427
[5] Christian
GavaIda et Jean Stoufflet, Droit bancaire
: édition, Paris, 1994, p.182.
[6]
Ian C. MacLeod, "Cornmitment Letters: Their Use and Some Specific
Considerations". Banking and Finance
Law Review, no 7, 1990, p. 64;
[7] L'article
2322 du Code civil résultant de l'Ordonnance n°2006-346 du 23 mars 2006
[8] Titre Dixième : Du cautionnement. articles
1117 à 1169 du Dahir 12 aout 1913 formant code des obligations
et des contrats
[9]
Dahir 12 aout 1913 formant code des
obligations et des contrats
[12]
Dahir 12 aout 1913 formant code des
obligations et des contrats
[13]
Arrêt de la cour de cassation n 231du 31
01 2001 ,
[14] Article 1140 :La caution peut
opposer au créancier toutes les exceptions, tant personnelles que réelles, qui
appartiennent au débiteur principal, y compris celles qui se fondent sur
l'incapacité personnelle de ce dernier. Elle a le droit de s'en prévaloir,
encore que le débiteur principal s'y oppose ou y renonce. Elle peut même
opposer les exceptions qui sont exclusivement personnelles à ce dernier, telles
que la remise de la dette faite à la personne du débiteur
[19] la loi n° 17-95 relative auxsociétés anonymes
[20] Article 2287-1
Code civil francais
[21] Article 70 la loi n° 17-95 relative auxsociétés
anonymes